1 - RAPIDE HISTORIQUE DE LA MAISON RURALE

DU NÉOLITHIQUE À LA FIN DU 19E SIÈCLE

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(Chapitre 1 de Habiter en Seine-et-Marne)

 

 

Au néolithique

Les premières traces d’habitations datent du Néolithique. Les hommes avant cette période vivent de la chasse et de la pêche et déplacent leur campement de manière régulière, en fonction des saisons et du gibier disponible. Les premiers paysans de la région sont arrivés par étapes successives depuis l'Europe centrale. Ce sont des "colons" qui implantent leurs villages dans les vallées de la Marne, de l'Aisne, puis de l'Oise. Ces premiers paysans cultivent le blé amidonnier et l'engrain, l'orge, les petits pois, les lentilles et les vesces. Ils élèvent des bœufs, des porcs, des moutons, des chèvres et chassent le sanglier, l'aurochs, le cerf, le chevreuil et plus rarement l'ours brun, le loup, le castor, le lièvre et des oiseaux. Pour la première fois, ils fabriquent des vases et utilisent des outils en silex ou en roche dure (grattoirs, couteaux, tranchets, lames de faucilles, haches polies et herminettes…). Aujourd’hui, l’emprise des maisons est parfois repérable d'avion grâce à leur forme générale plus ou moins trapézoïdale et à leurs fosses latérales. Des enceintes apparaissent progressivement, à partir de 4500 av. J-C.


A l’époque Gauloise

Dans son récit de La Guerre des Gaules, César mentionne à plusieurs reprises les aedificia comme étant les résidences, isolées dans la campagne, de la noblesse gauloise. César présente ces aedificia comme un type d'habitat, caractéristique de la Gaule, de la Bretagne au Rhin. Ce sont des ensembles élaborés. Curieusement, il précise que ces ensembles sont presque tous situés dans les bois "pour se mettre à l'abri des chaleurs de l'été". Cependant, ce n'est pas au milieu des bois (où l'air circule mal) que l'on résiste le mieux à la canicule mais derrière de simples rideaux d'arbres. Cela incite à penser que ces fermes devaient être entourées de rideaux d'arbres, un peu comme les fermes isolées actuelles de Normandie et de Picardie. Ces exploitations comportent de nombreux enclos, emboîtés. Les plus petits ont une fonction rituelle et surtout funéraire. Ils sont carrés ou ronds. Les plus grands enclos peuvent atteindre une superficie d’un hectare et avoir un tracé beaucoup plus irrégulier. 

Le type le plus courant de ferme est celui formé de deux enclos : l’enclos interne (I) (régulier et rectiligne et assez ramassé) et l’enclos externe (II) (curviligne, irrégulier et assez vaste). Dans la France du Nord, l'enclos (I) enserre l'habitation, les bâtiments d'exploitation, les granges, les étables, la porcherie, le poulailler ainsi que le jardin : c'est le "courtil", comme disent encore les paysans picards. L'enclos (II) beaucoup plus vaste est appelé le "plant" (herbage planté).
On sait désormais qu’existaient aussi des fermes isolées gauloises, en bois et en terre. A leurs activités d’élevage et d’agriculture, elle associaient de l’artisanat (métallurgie, céramique, filage…).

 

A l’époque gallo-romaine

Varron, dans son De re rustica, définit la villa comme « le centre d'un domaine rural important et bien cultivé » (fundus). Une villa est, en principe, isolée dans la campagne. Elle n'est donc qu'une grosse exploitation agricole au milieu de ses terres, ce que nous appelons aujourd'hui, une "grande ferme". Le terme de "villa" n'apparaît, à propos de la Gaule, que dans le récit des guerres de l'an 21 et de 70 après J.-C. chez Tacite. César n'emploie jamais ce mot. Il parle, lui, d'aedificia. Pour le conquérant, le mot "villa" ne peut désigner une construction "barbare", mais uniquement une habitation élaborée, "civilisée", c'est-à-dire un établissement rural répondant aux normes romaines dans sa conception et son ordonnance parfaitement géométrique, pour son plan de masse comme pour la résidence du maître. La villa obéit déjà à des règles architecturales de symétrie et surtout introduit la maçonnerie, tout au moins pour les fondations, ce qui est tout à fait nouveau en Gaule. Dès que les aedificia sont construits à la mode romaine (more romanorum), ils deviennent des villas, qui marquent ainsi l'empreinte et l'emprise de Rome dans les provinces conquises. Elles sont, ici, le fondement même de la civilisation gallo-romaine et de la mise en valeur systématique des terres. La villa gallo-romaine d'Estrée-sur-Noye (Somme) a servi de base à l'élaboration de la maquette, d'après les fouilles effectuées par R. Agache.

Le plan le plus courant des habitations rurales, grandes ou petites, est le plan tout en longueur. Il peut s'agir d'un simple rectangle, environ trois, quatre ou cinq fois plus long que large. Les habitations modestes mesurent de 20 à 30 m et sont généralement subdivisées en trois pièces. Certaines, plus vastes et plus allongées peuvent atteindre 70 à 80 m. Presque toutes ont une galerie extérieure, disposée parallèlement à la façade principale qui peut être ouverte ou fermée aux extrémités latérales. Certaines galeries débordent sur un ou plusieurs côtés. Il est assez fréquent qu'une autre galerie existe sur l'autre façade. Ces galeries ont certainement un rôle ornemental, mais aussi surtout une fonction pratique : il s'agit de protéger des intempéries les portes et les fenêtres, car manifestement. Il n’y a pas d’atrium comme dans les villas de Narbonnaise ou d’Italie. L’architecture romaine s’est donc adaptée à la région. De très nombreux édifices ruraux sont détruits lors des invasions du IIIème siècle ap JC. La vie reprendra cependant dans quelques villages. Les terres sont remises en culture par les mêmes barbares qui s’installent dans le pays.

 

Au moyen-âge

A partir du Haut Moyen-Age, les habitations rurales sont construites en matériaux périssables (toiture végétale avec ossature en bois et remplissage de terre). Elles seront détruites à leur tour à certains endroits à l’occasion des invasions normandes des IXème et Xème siècles.

A partir de cette époque, l’habitat rural tend à se fixer grâce aux mottes castrales, parfois repérables grâce à la photographie aérienne. Les tours sur les mottes optent rapidement pour des matériaux « en dur », résistant notamment au feu. Elles représentent en effet l’autorité du seigneur, mais aussi et surtout un abri pour se protéger des attaques et des pillards. C’est aussi à ce moment que se constituent les terroirs villageois autour de ces populations rurales sédentarisées (représentant alors 90 à 95 % de la population). 
A partir des XIIème et XIIIème siècles, l’essor économique reprend et de nombreux hameaux ou villages sont créés. Ils sont reconnaissables dans la toponymie à travers des mots comme « essarts » (défrichements), « plessis » (clos) ou « villeneuve ». 
Les maisons qui sont parvenues jusqu’à nous sont construites en pierres massives, avec des chaînes d’angle et des encadrements de baies bien appareillés.

Plus tardivement, on voit apparaître des ouvrages utilisant la pierre et le bois. Ces constructions souvent recouvertes de chaume5, furent détruites rapidement pendant la guerre de Cent Ans. Les rares maisons qui subsistent de l’époque se trouvent dans des bourgs, lieux de refuge des populations pendant les grandes catastrophes (épidémies, famine, invasions et grands froids).
Dans le Nord de la France, on compte quelques maisons datées du 15ème siècle : - Près de Montmirail (Marne) : la Haute-Vaucelle (présence d’une porte d’entrée de facture médiévale et d’un encorbellement ). - A Nogent-l’Artaud (Aisne) : maison à pans de bois.

 


 

Des Temps Modernes à l’époque contemporaine

En Seine-et-Marne, à cause des guerres de religion, peu de vestiges de constructions rurales sont antérieurs au 16ème siècle. On peut tout de même savoir à quoi ressemblaient les maisons car les Archives Départementales disposent d’une représentation sur un plan daté de 1536. 
Les maisons ressemblaient donc beaucoup à celles que l’on trouve dans les campagnes aujourd’hui. Les murs sont en pierres enduites et les toits en chaume. L’usage de ce dernier nécessitait cependant une toiture plus pentue. La façade est à pans de bois alors que les autres murs sont en pierre. 

Quelques exemples subsistent en Seine-et-Marne : - A Rozay-en-Brie : maison à pans de bois. Sa structure repose sur des fondations en grès. Les caves sont voûtées en meulière. - A Chartronges (maison de la Fosse) : construite début 17ème, ses techniques de construction sont donc celles du 16ème siècle. - A Saint-Rémy-la-Vanne (près de Coulommiers, maison des Limons Couronnés) : construite en 1603 (datation précise grâce à une monnaie retrouvée et placée par l’architecte), murs à colombages.
L’architecture des villages briards, tels que nous les connaissons aujourd’hui, date donc du 17ème siècle. A partir de cette période, l’habitat rural se développe en dépit des destructions liées aux guerres civiles (la Fronde). Cette architecture durera parfois jusqu’à la 1ère Guerre Mondiale.

 

Caractéristiques de la maison paysanne briarde à partir de Louis XIII 

Les murs extérieurs ou porteurs des maisons d’habitation sont en pierre et épais (de 45 à 80 cm). Ils sont plus larges à la base qu’au sommet. Une ordonnance royale de 1667 interdit en effet les pans de bois et le torchis , sauf dans les régions les plus pauvres du royaume. - Les murs des étables sont en bois, accompagné de torchis placé entre des lattes puis recouvert d’un mortier. Pourquoi ? La sueur et l’urine des animaux sont en effet un répulsif naturel pour les insectes qui n’attaquent pas le bois… - Organisation intérieure : grande salle commune chauffée par une vaste cheminée. - Le chaume est utilisé jusqu’à la fin du 19èmesiècle. On le considère alors comme dangereux car c’est l’époque du développement des lampes à pétrole qui multiplient les risques d’incendie. Les assurances donnent des avantages aux propriétaires qui les remplacent par des tuiles. D’abord matériau cher, leur prix baisse rapidement grâce à la fabrication industrielle. 
La masure, maison la plus modeste du milieu rural, avec chaume et murs à pans de bois, est encore majoritaire jusqu’en 1840. Elle disparaît progressivement ensuite mais une photo en atteste l’existence à Coubertin, près de Mouroux au début du 20ème siècle.

 

Remarque : les illustrations sont disponibles sur la version papier. 
 

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SOMMAIRE CHAPITRE :

A • Au Néolithique

B • A l’époque gauloise

C • A l’époque gallo-romaine

D • Au Moyen-Age

E • Des Temps Modernes à la fin du 19ème siècle

 

 

 

LEXIQUE

Appareillage :

Encadrement: Toute bordure saillante, moulurée, peinte ou sculptée autour d’une baie, d’une porte, d’un panneau de façade.

 

Atrium : 

c’est le centre de la maison de la Rome antique. Cour à ciel ouvert au centre de laquelle se trouve un bassin, elle est bordée de toits orientés vers l'intérieur.Cela permet au bassin de recueillir les eaux de pluie, stockées ensuite dans des citernes. A l'époque royale, l'atrium sert de cuisine et abrite également l'autel domestique de la maison. Il est entouré de toute une série de pièces qui sont généralement les chambres à coucher (les cubicula).

 

Chaîne (d’angle) :

Structure horizontale ou verticale construite en matériau différent du parement.
 

 

Chaume :

Tiges de graminées (seigle), de genêts ou de roseaux utilisées comme matériau de couverture. Le chaume est un bon isolant thermique.

 

Colombages (mur ou maison à) :

synonyme de « pans de bois ».

 

Encadrement :

Toute bordure saillante, moulurée, peinte ou sculptée autour d’une baie, d’une porte, d’un panneau de façade.

 

Encorbellement :

Partie saillante d’une construction qui prend appui sur des « corbeaux ». Plus généralement tout ouvrage en porte-à-faux ou en surplomb des façades des étages inférieurs.

 

Enduit :

L’enduit de finition donne à la façade son aspect final, sa texture et sa couleur. Traditionnellement, enduit de plâtre au Nord de la Seine-et-Marne, enduit de chaux au Sud. L’enduit uniforme tiré à la règle par petites surfaces régulières recouvre la totalité de la maçonnerie. L’enduit « à pierre vue », largement beurré, laisse voir quelques pierres, à fleur de parement ; plus économe en matière, il correspond à une architecture moins élaborée (grange ou façade secondaire).

 

Mortier :

Mélange obtenu à partir d’un liant, d’un  agrégat avec adjonction d’eau pour maçonner.

 

Pan de bois :

Construction avec ossature en bois et remplissage en matériau léger.

 

Torchis :

Mortier de terre argileuse mélangé avec de la paille.

 

 

 

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